Projet Moschopoulos

Nous sommes heureux d’annoncer que nous avons obtenu le soutien de la Maison des sciences de l’homme-Alpes pour la mise en route du projet Moschopoulos que vous pourrez trouver ci-dessous. La lecture optique du texte en OCR a commencé en juin 2015 avec trois étudiantes stagiaires à la Bibliothèque universitaire. Nous serions contents de rencontrer des collaborateurs nouveaux intéressés pour développer le projet dans le futur.

Vers une édition digitale du commentaire à l’Iliade de Manuel Moschopoulos

Notre collaboration a déjà abouti à la numérisation d’un ouvrage de nos collections imprimé en 1719 dont voici la référence complète: Man. Moschopuli Byzantini Scholia ad Homeri Iliados librum I et II; adhuc inedita [cum textu Homeri, versione latina] notis et animadversionibus Joannis Scherperzeelii; accedit commentarius Joachimi Camerarii [et eiusdem Iliados primi et secundi libri conversi in latinos versus].
Le texte numérisé se trouve dans la Bibliothèque numérique des Universités Grenoble 2 et 3:
bibnum-stendhal.upmf-grenoble.fr, mais la numérisation sous forme image, même d’excellente qualité, ne permet pas l’utilisation du document par les chercheurs, et n’est d’ailleurs pas indexée par les bibliothèques numériques françaises . Le projet soumis à l’appel à projets MSH vise à combler cette lacune par une collaboration internationale et interdisciplinaire.

1. Intérêts de cet ouvrage spécifique
Outre le fait qu’il est exempt de droits, l’ouvrage, qui n’a jamais été réédité et n’a été jusqu’à présent numérisé que par nous, présente un intérêt certain
-pour la petite communauté des spécialistes d’Homère et de la culture grecque byzantine,
-pour les spécialistes de l’histoire du livre et de l’écriture
-pour les informaticiens
à cause de la diversité des problèmes que sa structuration pose à l’analyse, et par suite à une bonne présentation sur le web.
L’ouvrage se présente en effet avec une grande complexité. Les imprimeurs de la Renaissance (et par la suite) ont su résoudre la difficulté de présentation, les humanités numériques doivent y arriver.

2. Une collaboration non seulement internationale et polyglotte mais aussi transséculaire
L’ouvrage réunit d’une manière originale plusieurs œuvres différentes, d’auteurs divers et remontant à des époques différentes:
– deux chants de l’Iliade d’Homère (œuvre difficile à situer dans le temps, entre le IXe et le VIe siècle av. J.-C. selon les divers spécialistes; l’auteur est tout aussi controversé)
– un commentaire dû au savant byzantin Manuel Moschopoulos (élaboré à Byzance sous la dynastie des Paléologues), initialement sous forme manuscrite
– l’édition de cette œuvre par un savant (flamand?) du XVIIe siècle, Johannis Scherpezeel qui a ajouté le commentaire de « Joachim Camerarius », un autre érudit européen, probablement germanophone, du XVIe siècle lui.

Les langues utilisées sont le grec (celui d’Homère étant assez différent de celui des scholiastes, rendant la lecture délicate parfois) et le latin utilisé par Schezpezeel et Camerarius. Nous proposerons de traduire en français en utilisant l’aide de l’ordinateur, toujours avec vérification par des spécialistes.
Notre édition datée de 1719 (en chiffres romains difficiles à lire) vient d’un imprimeur rhénan, Jacob van Poolsum, Utrecht (Trajecti ad Rhenum) . La page de titre et le contenu peuvent donner lieu à d’intéressants commentaires du point de vue de l’histoire du livre, de l’imprimerie, des couleurs (rouge et noir en l’occurrence), des marques d’imprimerie etc.

3. Vers une édition digitale
Notre projet prévoit des liens complexes entre les différentes rubriques du texte et des notes, les scholies anciennes reproduites par Moschopoulos et ses ajouts personnels, ainsi que les notes en latin dues à son éditeur Scherpezeel ou Scherpenseel . Son nom figure sous la forme Scherpezeelius (Joannes) dans l’index de Mousaiou tou grammatikou ta kath’Ero kai Leandron Musaeu grammatici (De Herone et Leandro Carmen) numérisé dans books.google.fr.
Le schéma d’une page du livre montre établi pour notre projet ANR par Hervé Blanchon le montre bien. Mais en outre, il faudrait arriver à montrer la relation entre les commentaires dus à Moschopoulos et ceux qui sont dus à Camerarius, présentés dans une deuxième partie du livre avec une nouvelle pagination. Cela pourrait être fait grâce à la participation à l’équipe de Christiane Louette, spécialiste du XVIe siècle.

4. De l’imprimé au manuscrit
L’importance de notre ouvrage pour l’histoire du livre est essentielle, car il permet de montrer comment la culture a évolué depuis l’Antiquité: l’Iliade a probablement été composée oralement, puis notée par écrit à une époque difficile à déterminer, et transmise ensuite par l’intermédiaire de rouleaux de papyrus, dont subsistent de nombreux fragments . La forme du livre que nous connaissons nous vient des manuscrits médiévaux, appelés du nom latin codex. Dans de nombreux manuscrits, des commentaires ont été notés dans les marges, parfois tout autour du texte primaire. Ces commentaires sont appelés scholies d’après leur nom grec.
Après l’invention de l’imprimerie, les éditeurs modernes ont quelquefois cherché à reproduire les scholies avec le texte qu’elles commentaient, et la solution la plus simple était d’essayer de reproduire la mise en page des manuscrits ou de l’adapter aux pages d’imprimerie.
L’ouvrage ici en question a suivi cette évolution: Moschopoulos, dans le cadre savant de Byzance, disposait de manuscrits antérieurs qui ont dû servir de base pour son propre manuscrit, ensuite recopié par des moines dans les scriptoria.
Il serait d’un très grand intérêt de comparer les manuscrits de Moschopoulos à l’édition imprimée de Scherpezeel. Nous avons localisé des manuscrits (à la bibliothèque Vaticane de Rome et à l’Ambrosiana de Milan) et notre projet devrait permettre à Jean-Fabrice Nardelli d’aller les étudier sur place (x missions de x mois à Rome et à Milan) et d’en faire soit une monographie, soit un commentaire supplémentaire à l’édition digitale.
Le titre de cette partie est volontairement paradoxal, remontant le temps au rebours de la chronologie pour souligner qu’en général, les lecteurs que nous sommes oublient que les livres n’ont pas toujours existé.

5. Comment les liens hypertextuels peuvent permettre de présenter simultanément ou alternativement divers passages
Par exemple on devrait pouvoir visualiser un passage et sa traduction (latine/française ou dans une autre langue européenne moderne), ou le même passage et ses commentaires (scholies en grec, notes en latin par Scherpezeel, commentaire latin de Camerarius).
L’édition digitale ainsi conçue reconstitue pour le lecteur moderne ce que l’édition d’Utrecht a partiellement réussi au prix de prouesses de mise en page (par exemple, pour le vers 1 du chant I de l’Iliade, la première page (p.2 et 3) ne comporte qu’un vers du texte initial, avec sa traduction latine en regard, tout le reste de la double page étant occupé après le titre et un bref résumé, par un étage de scholies et un autre de notes en latin. Ensuite, les pages 4-5 comportent deux vers, les pages 6-7 en comportent 5 et ainsi de suite.

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